Bonjour à tous,
Oui, Grominet M. A. Ouaknim est excellent, j'ai particulièrement apprécié son "concerto".
En très grande forme C1
Eh oui nous sommes à la fois la serrure et la clé.
CLAUDE. — Ma question vous est soumise de nouveau. Elle exige impérieusement une réponse, car je présume que la clef de la connaissance est cachée derrière elle. Que se passe-t-il en nous lorsqu’un argument est absorbé et assimilé ? Est-il possible de définir la nature de cet étrange phénomène dont la simplicité nous déconcerte : la conscience d’avoir compris — conscience pure, semble-t-il, et sans forme ?
MENON. — A l’instant exact où s’éclaire la conscience d’avoir compris — donnez à ce fait le nom qui vous plaira : connaissance, intelligibilité — l’argument, avec sa forme, ses articulations, cesse de flotter devant nous. Qu’est-il devenu ? Serait-il, maintenant, en quelque sorte inhérent à notre nature au point d’être indissociable de nous-mêmes ? Aussitôt qu’une formulation logique s’est imposée comme vérité intelligible par la force de l’évidence qu’elle porte en elle, nous la faisons nôtre. Elle est incorporée, pour un temps, dans l’intimité de notre conviction. En conséquence, elle a disparu du champ objectif de la conscience — bien qu’elle puisse y reparaître sous une figure nouvelle pour être reconsidérée.
Assimiler un théorème, c’est l’introduire dans le plan d’une évidence intérieure où cessent les oppositions du sujet et de son objet.
CLAUDE. — Si l’univers nous devenait, un jour entièrement intelligible dans une formulation des lois qui l’ordonnent, comment nous apparaîtrait-il ?
MENON. — Transformé en connaissance l’univers cesse de nous apparaître, la loi dont il est l’expression significative se substituant aux phénomènes et aux formes. Et cette loi cosmique — si elle est correctement formulée — s’évanouit à son tour quand elle a fini de remplir sa fonction qui est d’éveiller la connaissance.
CLAUDE. — Mon cher Menon, vous défiez le sens commun. Je refuse de laisser le monde aller au néant. Un flot d’objections me monte à l’esprit.
MENON. — Présentez-les, je vous prie, une par une, dans l’ordre où elles apparaissent.
CLAUDE. — Le cosmos doit-il se volatiliser par le seul fait qu’il est devenu intelligible ? Quand bien même j’aurais inclus dans une loi compréhensive la totalité des relations possibles à l’intérieur de l’univers, mes yeux, mes mains continueraient de témoigner qu’il existe des phénomènes, des formes concrètes.
MENON. — Eh bien, accueillez leur témoignage. Les yeux, les mains, l’audition et les autres sens remplissent leurs rôles lorsqu’ils réfèrent à un informateur, en éveil derrière eux, les signes impliqués dans les formes. Je m’explique à l’aide d’un exemple. Une silhouette oblongue, aux tons verts et bruns, surgit contre la lumière d’un fond bleu dans le cadre de votre vision. Qui donc l’identifie et le reconnaît pour être un cyprès devant le ciel ? Est-ce la fonction visuelle brute ? Non pas, certainement. Le mérite en revient à un observateur sensible à la dynamique informative des formes, à un témoin prompt à connaître. Ainsi, toutes les activités sensorielles tendent vers la connaissance et atteignent en elle leur foyer. Elles la rejoignent pour s’y éteindre sur divers plans d’intégration.
Imaginez qu’un enquêteur veuille exploiter à fond les ressources de ses sens accrus par l’instrumentation scientifique pour atteindre une connaissance intégrale — dans ses structures et infrastructures — de l’univers. À mesure que la recherche progresse, les formes visibles et tangibles en usage dans la vie familière cèdent à des configurations abstraites que l’intelligence seule saisit. Les lois succèdent aux lois. La pensée investigatrice se fait impersonnelle et son acuité croît. Quand sera atteinte la source initiale d’intelligibilité l’univers aura été résolu, à la manière d’une énigme, dans sa pure réalité intelligible.
CLAUDE. — Sera-t-il, pour autant, amené à disparaître ?
MENON. — Lorsqu’un message secret, transmis dans la formule du code, a été déchiffré, qu’advient-il de la formulation ?
CLAUDE. — Elle reste bien visible en noir sur blanc.
MENON. — L’écriture est inséparable, dès après la lecture, de l’intelligibilité du message, car c’est du message que les caractères écrits détiennent leur valeur d’existence. Vous ne pouvez voir en eux, à la suite du déchiffrement, qu’un moyen de communication ; tel est leur sens, noir sur blanc.
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Et "permettez-moi, à la fin d’une journée d’épreuve, d’aller retrouver, dans la connaissance de sa paix, le mesureur de l’incommensurable."